Melisande

Mélisande en plan resserré

« Resserrement de la formation instrumentale, par Florent Hubert. Parmi les instruments choisis, l’accordéon, comme un petit orgue, est le garant du mélodique et de l’harmonique. Les percussions accentuent les rythmes. La harpe, instrument debussyste, assure le lien avec la féerie, le conte de fée, source d’inspiration de l’opéra. Le violoncelle apporte le lyrisme. Il s’agira donc de faire entendre cet opéra de façon à la fois identique et différente, de le sublimer par la proximité plus grande entre les instruments, les chanteurs et les acteurs. Le deuxième resserrement est théâtral. Mélisande devient le centre névralgique du projet. Face à elle, trois figures masculines, trois âges de la vie : les frères de la pièce, amoureux de Mélisande, Golaud et Pelléas, l’un interprété par un acteur, l’autre par un chanteur ; et une troisième figure, un comédien, présence poétique qui condense à elle seule toutes les figures de l’observation et de l’empathie de l’opéra originel : le médecin, Arkel et Yniold. Le spectacle révèle la plongée dans une psyché et dans un traumatisme. Mélisande, l’une des femmes de Barbe-Bleue, a fui son bourreau. En suivant Golaud, elle croit s’assurer une protection mais elle ne trouve que la prison d’une conjugalité déceptive. Ses silences, ses mensonges, tous ces boucliers derrière lesquels elle pense pouvoir se cacher, sont vains. Comme dans un cauchemar, la monstruosité resurgit et Golaud se transforme finalement en Barbe-Bleue. Mais paradoxalement, c’est cette scène traumatique qui libère Mélisande des entraves de son passé, lui fait prendre son destin en main et la fait accéder à des choix : celui de provoquer Golaud, celui d’aimer Pelléas, au risque de le faire tuer, au risque d’en mourir. »

Catherine Ailloud-Nicolas, dramaturge